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samedi 18 mai 2024
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Dr Kgossi Letlape (Pdt ordre des médecins et dentiste Af.sud) / Accès à la santé et à l’éducation... « 24 ans après la fin de l’Apartheid, il n’y a vraiment pas de progrès »

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 Dr Kgossi Letlape (Pdt ordre des médecins et dentiste Af.sud) : « Nous avons une élite qui utilise les pauvres comme la chair à canon dans leurs combats(…) » Dr Kgossi Letlape (Pdt ordre des médecins et dentiste Af.sud) : « Nous avons une élite qui utilise les pauvres comme la chair à canon dans leurs combats(…) »

Près de 25 ans après la fin de l’Apartheid en Afrique du Sud, ce pays affiche certes sa place de puissance économique en Afrique, mais les disparités entre noirs et blancs persistent. Le Docteur Kgossi Letlape, président de l’ordre des médecins et dentistes d’Afrique du Sud que nous avons rencontré à Johannesburg fait des révélations….

 

L’Afrique du Sud est une puissance économique en Afrique. Près de 25 ans après la fin de l’Apartheid. Quel point peut-on faire dans le domaine de la Santé ?

Ce que nous pouvons dire, précisément sur le plan de la santé, le système en place est celui issue de la période d’Apartheid. Avant, nous avions un système d’accès aux soins pour les noirs et un autre pour les blancs. Après l’indépendance, ça évolué en système de santé pour les riches et un autre pour les pauvres. Malheureusement, l’essentiel des riches ce sont les blancs pendant que le gros lot des noirs sont les pauvres. La plupart des noirs qui sont dans la classe privilégiée, ce sont les politiciens, des professionnels, des fonctionnaires et nous assistons à une certaine assimilation de l’élite noire. Conséquence, visiblement, nous sommes face un échec dans la mise en place d’une Afrique du sud pour tous. Notamment en termes de santé et d’éducation. C’est bien d’avoir le droit de vote, mais la division entre noir et blanc persiste toujours. Dans le secteur de la santé, il y a une division entre le secteur privé et le publique. C’est ça nouvelle Afrique du Sud.

Voulez-vous dire aussi que le nouveau régime en place, ne fait rien pour améliorer la situation ?

L’Apartheid n’a pas disparu, elle reste présente dans les mentalités. Aussi, nous ne voulons pas donner l’impression que le gouvernement n’a pas essayé de faire quelque chose dans les domaines de la santé et de l’éducation. La nouvelle administration a mis en place, une loi au niveau de la santé qui a pour objectif de promouvoir et assurer la santé pour tous. Bref pour tous les citoyens sud-africains. Mais disons – le net, les blancs sont toujours en avance sur les noirs. Après 24ans de changement de régime, il n’y a pas vraiment de progrès en termes d’accès à l’éducation et à la santé. Toutefois, il y a une prise de conscience et une volonté politique, pour faire changer les choses et on pense bien pouvoir faire changer les choses et trouver des solutions. Avec la nouvelle administration, nous avons beaucoup espoir que les choses vont changer.

Justement parlons du nouveau Président. Quand est arrivé, il a promis faire la promotion des Pme/Pmi, pour créer beaucoup et une nouvelle race d’employeurs. Où en sommes –nous ?

C’est un peu tôt de voir les résultats de ce que fait le Président Cyril Ramaphoza. Il a encore une période de grâce. Il a fait des promesses réalistes. Notamment son engagement à lever 100 milliards de dollars soit plus de 50 mille milliards de Fcfa pour les investissements. Il a également le soutien du Royaume unie et de l’Arabie Saoudite. Vous le savez autant que moi, sans argent, on ne peut rien faire. Le nouveau Président semble déterminé à aller jusqu’au bout. En Afrique du sud, nous avons la persistance de la haine de soi. Les africains ne s’aiment. Ce constat est aussi propre non seulement pour l’Afrique du Sud que pour les autres pays africains. Quel est le type d’africain que nous voulons. Nous n’ avons pas encore trouvé une réponse à cette question. L’élite africaine pense que la liberté, c’est être blanc ou faire comme les blancs. On ne cherche pas à être de meilleurs africains mais on cherche à copier sur les blancs simplement. En Afrique du sud, les blancs ne sont pas partis. Nous sommes dans un environnement spécial où l’élite noire quand elle monte elle a été dans les quartiers des blancs. Ce qui fait les meilleurs ont été dans les quartiers des blancs donc, les quartiers des noirs ne peuvent pas se développer. Les enfants des élites vont dans les écoles des blancs et même en termes d’apparence, quand le noir réussi, il épouse une blanche, pour dire qu’il a percé. Nous avons une élite qui utilise les pauvres comme la chair à canon dans leurs combats.

En claire selon vous en Afrique du Sud, il y a toujours deux systèmes ?

Tout à fait : Nous avons le privé et le public. Contrairement aux autres, pays où après l’indépendance, on a démantelé le système colonial. Chez nous quand nous avons un problème de santé, l’élite va soit en Europe, en Inde ou en Malaisie en tourisme médical. Si rien n’est fait, dans notre pays, nous allons connaitre le même cas de figure que dans les autres pays africains. Au niveau de la Santé, la population demande beaucoup à notre système sanitaire(…)

Parlons un peu de la lutte contre le Sida dans votre pays ?

Heureusement, la politique sanitaire de notre pays fait de gros effort dans ce sens. Il y a des efforts pour faciliter l’accès au traitement ainsi que la prévention. Nous avons des efforts à faire dans ce sens en Afrique du Sud. Nous pensons qu’il faut maintenir le cap dans l’ensemble(…)

Toute à l’heure dans votre communication, vous avez dit que les africains ne prenaient pas assez d’initiatives et que c’est l’Organisation mondiale de la Santé qui dictent tout. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Les solutions aux problèmes des africains doivent venir d’eux-mêmes. En ce qui concerne le tabac, tout se passe. Nous avons la convention cadre pour la lutte contre le tabac dont tous les pays sont membres. Chaque pays à la possibilité de ratifier ou non. De transposer ou non cette convention ou non dans ses propres lois. C’est comme ça que les Usa qui est pays puissant n’ a pas signé. Mais les Usa ont une agence nationale qui est la Fda( Food and drug administration). Ils ont leur propre loi qui n’a rien avoir avec ce que fait l’Oms. Eux, ils tiennent compte de leur propre contexte socio- économique, contexte des affaires. Il en est de même dans l’Union européenne( Ue). Où les pays membre décident entre eux, ce qu’ils peuvent intégrer entre eux, les résolutions de la convention. Aussi il y a une partie des recommandations de la Convention indiquée plus haut dont ils disent qu’ils veulent intégrer à leur guise à leur texte national. Par exemple si nous prenons l’exemple de la Nicotine, la convention dit qu’il faut telle concentration( …) Dans l’Union africaine,( Ua) on en parle pas et on adapte pas ce que dit au niveau de la convention. Prenons par exemple le cas du Malawi qui est un grand producteur africain de tabac. Ce pays devrait à son niveau voir comment protéger son marché. Non, c’est le chacun pour soi. Les occidentaux nous donnent de l’aide et après, ils nous donnent des instructions. Ce n’est pas une aide au développement ça. Mais simplement de l’aide. Il n’y a pas de discussions et on n’intègre pas ce qui vient d’ailleurs. Par exemple, il y a des pays où on dit que l’Oms a dit que l’Oms a dit de bruler les cigarettes électroniques et pourtant, l’Oms n’ a pas dit ça. En Afrique, nous ne sommes pas organisés. Dans les écoles américains lorsqu’un petit américain à un problème, on l’aide. Pareil dans les écoles indiennes. Ils vont l’appuyer voire mettre en place un réseau pour l’aider.

Voulez –vous aussi dire que ce n’est pas le cas au pays de Mandela ?

Ce n’est pas le cas en Afrique du Sud. Si le noir a un problème et qu’il essai d’appeler un autre pour l’aider, on dira que non c’est du racisme ou de la discrimination alors que les autres communautés, échangent entre elles et s’entraident. Ce sens de la communauté-là n’existe pas chez les noirs. Il faut commencer par soi –même. Si nous nous ne sommes solidaires, ça n’ira pas pour nous. En Afrique du Sud, les noirs resteront aux affaires, tant que nous nous continuions de nous aimer les uns et les autres comme par le passé(…) Ce qui n’est pas encore tout à fait le cas. Nous avons encore du chemin à parcourir. Nous sommes fiers des héros comme Nelson Mandela et autres grands combattants de la liberté. Il en est de même pour ces grands médecins de renommée mondiale qui sont d’origine sud-africaine. Ce n’est pas en nous comportant en victimes que nous allons gagner(…) Mandela disait que le changement commence d’abord au niveau individuel. Si toi tu opte pour le changement tout comme moi, c’est que cela est possible au niveau de notre continent( Afrique)( voir encadré)

Vous aussi parlez du paquet neutre de cigarettes. Y a problème me semble-t-il ?

On devrait pouvoir en discuter. Parce que dans nos pays ça favorise le trafic, la contrefaçon et la contrebande sur les cigarettes. On devrait pouvoir organiser un forum pour en débattre. Avec ça on ne peut plus avoir de contrôle et tracer la production locale. Si tous les produits illégaux fleurissent, ça va être difficile pour l’industrie locale dont tous les actifs vont péricliter.

Interview réalisée à Johannesburg, par Bamba Mafoumgbé,Cette adresse courriel est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

 

Encadré : L’Afrique du Sud de l’après Zuma et en attend 2019…

La Nation arc-en- ciel secouée par des convulsions internes

Plus de 24 ans après la fin de l’Apartheid, ce n’est vraiment pas encore le paradis en Afrique du Sud. Cet autre géant africain. Qui malgré le droit de vote acquis de haute lutte par les noirs, on a du mal à faire disparaitre pour de bon l’apartheid dans les mentalités. Dans bien de secteurs d’activités, les blancs sont ‘les chefs et les noirs les subalternes’ notamment dans l’industrie et les services. (Hôtellerie). Comme le dit le Dr Kgossi Letlape, activiste de la santé et président de l’Ordre des médecins et dentistes de l’Afrique du Sud, « C’est bien d’avoir le droit de vote mais la division entre noir et blanc persiste toujours. Dans le secteur de la santé, il y a une division entre le secteur privé et le publique. C’est ça nouvelle Afrique du Sud. » Dans un tel contexte et à un an des élections , prévues pour 2019, la Nation arc- en –ciel semble traversée par des courants et convulsions à fort parfum de « racisme revendiqué » Selon ‘le Point Afrique’, « Parler de nationalisme serait d'ailleurs minimiser les propos tenus, tout récemment, contre la communauté indienne d'Afrique du Sud, par les président et vice-président du second parti d'opposition du pays , l'Economic Freedom Fighters,( Eff) (Combattants pour la liberté économique), Julius Malema et Floyd Shivambu » Aussi ce magazine qui a enquêté sur la situation, ajoute que : « Très souvent est pointé du doigt le racisme des Blancs, dont celui des Afrikaners nostalgiques de l'apartheid, envers les Africains. Or la tendance à discriminer propre aux africains est au même moment minimisé, voire ‘caché sous le tapis’, au nom de la souffrance du ‘peuple noir’. Il n'est naturellement aucunement question de remettre en cause l'histoire de l'esclavage, de la colonisation et de la discrimination, qui mine encore aujourd'hui le continent africain en général et l'Afrique du Sud en particulier, mais la question doit être scrutée dans le cadre d'une vision large dont la caractéristique est de condamner toute forme de discrimination qui bafouerait la dignité des hommes et des femmes, de quelque origine qu'ils (elles) soient » Dans le cas sud-africain, avec la montée du nationalisme africain qui est très éloigné de celui des Pères fondateurs de l'Anc des années 1910, voire du Mouvement de la Conscience noire (Black Consciousness Movement ,(Bcm) de Steve Biko, des années 1970 , le parti de Julius Malema, en victimisant à outrance les africains et de manière contre-productive tend à vouloir beaucoup plus diviser qu'à unir, dans une stratégie purement électorale. L'Eff s'attaque tour à tour à la communauté blanche à travers une rhétorique populiste, violente de la redistribution des terres et à la communauté indienne. À l'instar de l'Alliance démocratique ,(Democratic Alliance) (Da) , premier parti d'opposition, l'Eff semble « déboussolé » depuis le départ de Jacob Zuma de la présidence en février 2018. Le plus grand scandale de corruption qu'a connu l'Afrique du Sud, dans lequel est impliqué l'ex-chef d'État, et notamment son entourage proche (son fils Duduzile et les frères Gupta), a été très longtemps le « carburant politique » de l'Eff se présentant comme le porte-voix des plus vulnérables de la société sud-africaine. Zuma est parti et devra continuer de répondre au feu roulant des questions de la justice sud-africaine sur les faits de corruption dont il est accusé. Quel vise et quelle Anc lors des élections de 2019 pour l’homme d’affaire Ciryl Ramaphoza aux affaires depuis année 2018 ? Le Docteur Kgossi Letlape parfois très critique lors des causeries hors micro avoue : « C’est un peu tôt de voir les résultats de ce que fait le Président Cyril Ramaphoza. Il a encore une période de grâce. Il a fait des promesses réalistes. Notamment son engagement à lever 100 milliards de dollars soit plus de 50 mille milliards de Fcfa pour les investissements. Il a également le soutien du Royaume unie et de l’Arabie Saoudite. Vous le savez autant que moi, sans argent, on ne peut rien faire. Le nouveau Président semble déterminé à aller jusqu’au bout » Ramaphoza arrivera-t-il redonner une autre image de l'Anc et du gouvernement dans la lutte contre la corruption ? Arrivera-t-il à mettre en œuvre la réforme agraire dont la mise en œuvre fait fait des vagues ? Attendons de voir.

 

Bamba M.

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